Avant de devenir l’un des plus grands mangakas de tous les temps, Oda a connu une série d’échecs cuisants. Le créateur de One Piece est revenu sur la version maudite de Romance Dawn, un prototype catastrophique qu’il considère aujourd’hui comme son plus gros raté.
One Piece n’a pas toujours été le mastodonte que l’on connaît. Derrière les records de ventes et les arcs légendaires, il y a eu des versions avortées, des nuits blanches, des humiliations éditoriales. Dans une interview exclusive publiée dans One Piece Magazine le 3 octobre 2025, Eiichiro Oda revient sur les origines du manga… et avoue avoir failli tout abandonner après un one-shot désastreux.
A lire aussi :
- One Piece bouleverse tout avec un nouveau personnage au Haki aussi puissant que celui de Shanks, et les fans n’avaient rien vu venir
- Le monde de One Piece tremble : une révélation d’Elbaf pourrait faire de Shanks un être supérieur à Joy Boy, et tout indique que ce n’est pas un hasard
Une version prototype qui frôle la catastrophe
Avant que Luffy n’étende ses bras en pleine page du Weekly Shonen Jump en 1997, Eiichiro Oda enchaînait les essais infructueux. L’un des plus marquants fut Romance Dawn Version 2, un prototype de 45 pages réalisé en deux semaineschrono. Le concept ? Une aventure condensée sur un bateau, imaginée dans l’urgence, avec une équipe réduite d’assistants. Oda confesse aujourd’hui que l’expérience fut chaotique : pas de trame solide, des délais intenables, une pression constante. Il ne garde aucun souvenir clair du rendu final, juste le soulagement d’avoir évité « de laisser une page blanche dans le Jump ».
« Ce n’était pas bon, mais ça m’a appris une chose : il faut sauter sur les opportunités, même quand elles arrivent au pire moment. »
Il n’a jamais été un héros : la vérité glaçante sur Shanks que One Piece a longtemps cachée
Une succession de refus avant le grand départ
Avant même Romance Dawn, Oda publiait en 1994 un one-shot intitulé Monsters, aujourd’hui réédité dans le recueil Wanted!. Malgré un potentiel évident, ses projets suivants comme Ikki Yakō ou Future Present From God furent systématiquement rejetés par les éditeurs. Il reconnaît que ces refus répétés l’ont profondément miné, au point de remettre en cause son avenir dans le manga. Entre 1994 et 1996, il vécut ce qu’il appelle sa période de “rejet en série”, malgré une vie d’assistant qu’il décrit comme « pétillante et joyeuse ». Ce paradoxe entre bonheur au quotidien et échec professionnel est un classique du métier.
Une pression extrême liée au rythme du Jump
Le Weekly Shonen Jump, célèbre pour son rythme infernal, impose un format hebdomadaire quasi inhumain. Oda a vécu cet engrenage dès ses premiers tests, avec des délais de 15 jours pour 45 pages, story-board, encrage et dialogues inclus. Ce tempo de forçat exclut toute erreur, toute hésitation, toute baisse de régime. Même si la version 1 de Romance Dawn avait reçu un bon accueil dans les sondages de 1996 (3e place sur plusieurs numéros), elle ne suffisait pas à convaincre les décideurs du Jump. Il fallait réessayer encore.
« J’étais heureux que mon histoire ait devancé celle d’un auteur en poste… mais derrière, il fallait recommencer de zéro, sans garantie. »

Des idées recyclées dans One Piece
Le plus fascinant dans ce parcours, c’est la récupération d’éléments écartés. Le personnage de Shanks, initialement présent dans la version 1, fut réintégré dans le premier chapitre officiel. On retrouve aussi des prémices de Zoro et Mihawk dans Monsters, ou encore des esquisses de Garp dans la version 2. Cette réutilisation des personnages témoigne d’une cohérence créative profonde, qui s’est affinée au fil des essais. Oda n’a jamais abandonné ses idées, même lorsqu’elles étaient refusées.
| One-shot | Année | Élément réutilisé dans One Piece |
| Monsters | 1994 | Ryuma → Zoro |
| Romance Dawn V1 | 1996 | Shanks, Luffy |
| Romance Dawn V2 | 1996 | Garp-like personnage |
| Future Present From God | 1995 | Dynamisme narratif |
Une solitude que partagent d’autres mangakas
Oda n’est pas un cas isolé. Il évoque d’ailleurs le parcours de Tatsuya Endo, créateur de Spy x Family, qui a lui aussi connu une période de tentatives avortées, entrecoupées de maux de dents, d’insomnies et de remises en question. Le métier de mangaka est marqué par l’échec silencieux : des planches qui finissent à la poubelle, des séries testées mais non publiées, des rêves sabordés à quelques semaines de validation. Ce cycle de refus forge une forme de résilience unique.
Une leçon d’humilité pour les fans
L’interview d’Oda rappelle que même les légendes ont connu l’échec. Et pas un petit échec : un désastre complet, qui aurait pu enterrer One Piece avant même qu’un éditeur y croit. Pour les fans, cette prise de parole est un rappel : ce manga n’est pas né parfait. Il est le résultat de combats invisibles, de sacrifices, de décisions imparfaites qui, combinées, ont mené à un chef-d’œuvre. Il serait facile de ne voir que la gloire de One Piece, les 500 millions d’exemplaires vendus, le record de longévité ou le succès mondial. Mais derrière chaque page, il y a l’ombre de ce Romance Dawn Version 2, qui aurait pu tout faire basculer.
Une franchise plus forte après l’aveu de faiblesse
Aujourd’hui, One Piece est dans une phase de renouveau narratif avec l’arc d’Elbaf, et Oda a su se recentrer sur le cœur émotionnel de son œuvre. Les fans saluent de plus en plus sa vulnérabilité publique, ce qui humanise un créateur parfois vu comme intouchable. Cet aveu d’échec, loin d’écorner son image, renforce l’admiration qu’on lui porte. Il prouve que même au sommet, un auteur peut revenir sur ses moments de doute, et que c’est justement ce doute qui nourrit la création.
Source :
- One Piece Magazine
- Weekly Shonen Jump
